2009/12/17

Être dans le CH, j’aimerais mieux jouer à l’avant

On connaît le triste traitement réservé à nos cerbères par les fans. La moindre petite erreur, on demande l'extradition.


Et jouer comme défenseur dans l'alignement du Canadien de Montréal, c'est un peu comme revêtir le redouté chandail rouge des bas-gradés de Star Strek envoyés en mission de reconnaissance. Immanquablement, il y en avait un qui ne revenait pas de mission.

Affiche de Echosphere.net

2009/12/14

Tout un Match que celui de Ken Dryden!

J'aime le hockey, vous le savez déjà. J'ai toujours eu un faible pour les gardiens de but. Jacques Plante m'avait toujours fascinée, ce type au talent et à l'inventivité certains. Rogie, il paraissait bien aux yeux d'une fillette d'une dizaine d'années. Même le sympathique Gump Worsley, que la nature n'avait pourtant pas choyé, avait réussi à me charmer. Mais quand ce grand Ken est arrivé, moi qui venais à peine de me défaire de mes poupées Barbie, coup de foudre instantané !

Mais convaincue que j'étais de ne pas être une fan du Canadien comme les autres, il me fallait une idole pas tout à fait comme les autres. Et le grand Ken répondait aux exigences.



Bon. On dit souvent que le gardien de but est un joueur spécial si on le compare aux autres dans son équipe. Qu'il est caractériel. Qu'il possède une «force du mental» qui sort de l'ordinaire. Qu'il doit avoir sa bulle. D'ailleurs, c'est quoi exactement la bulle d'un cerbère ? Un espace aux limites que nul ne peut traverser ? Une aura magique à la fois solide et fragile qui le protège et l'isole du temps et des intempéries partisanes ?



Peut-être aussi que j'aime les gardiens parce que j'ai moi aussi un «mental» spécial. Pas nécessairement fort, mais pas ordinaire non plus. Souvent je me suis sentie incomprise. Souvent je me suis sentie perdue, non assimilable à un groupe, à une secte ou à des conventions préétablies même si on m'accuse souvent d'être trop conservatrice. Je ne sais pas. Je ne sais plus. Et ça ne me tente pas de me perdre en introspection ce matin.


J'ai négligé mon écriture ces derniers jours, me consacrant davantage à la lecture. Il est bon de se contrebalancer parfois. Je voulais me détacher de ma passion pour le hockey et je n'ai pas tout à fait réussi. Bien, c'est la faute à mes Glorieux qui ne finissaient plus d'en finir avec leur foutu centenaire. Mais quelle finale! Coïncidence ou circonstances, c'est ainsi que j'ai entamé la lecture du livre de mon idole dans les derniers jours du centenaire flanellique, pour en tourner la dernière page dans les premiers jours d'un nouveau siècle de mon équipe préférée.



Qu'en dire ? J'ai A-D-O-R-É. Bon, c'était gagné d'avance que certains diront. Peut-être...



Mais c'est beaucoup plus qu'un livre de sport, définitivement plus qu'un simple livre de hockey ou sur le hockey. C'est un livre sur la passion, mais une passion raisonnable et raisonnée. Hé ! Faut-il vraiment s'attendre à autre chose venant du joueur de hockey le plus cérébral ayant jamais existé ?



J'y ai trouvé mon compte, revivant avec lui ces tourments de fin de carrière, une fin prématurée si l'on compare à d'autres. Quelque chose à laquelle je peux m'identifier et raison probable pour laquelle j'ai savouré à petites doses, la proximité émotive étant trop forte...



Quiconque prétend aimer le hockey se doit de lire ce livre. Surtout s'il (ou elle, et dès cette phrase j'allégerai le texte en faisant usage du masculin générique) se dit partisan du Canadien et encore plus s'il est nationaliste de surcroît. Ma première réaction en refermant ce livre fut telle que j'ai failli en commander un exemplaire à faire livrer à Réjean Tremblay, lui qui se veut friand d'histoires et d'Histoire – il commence d'ailleurs à radoter le Réjean qui recycle ses titres de chroniques: ici et ici. Je suis sûre que même lui finirait par comprendre ce qu'il se refuse d'admettre. Il y parle de nationalisme. Pas comme un politicien fédéraliste – avis aux (non)intéressés: ce n'est pas cet homme qui a écrit ce livre. Il y parle de cette fierté nationaliste du pays créateur d'un sport, mais qui l'a pourtant laissé tombé. Il y parle de la triste réalité qu'une entreprise ne puisse continuellement promettre parades et pure laine pour satisfaire les passions partisanes les plus toquées. Il y parle de ces perceptions que les médias et publicitaires réussissent à transplanter dans l'imaginaire de gens à la recherche de héros qui sont malheureusement trop humains.



Pourquoi avoir attendu autant d'années avant d'avoir lu ce livre, je l'ignore. Mais la bonne nouvelle est qu'il est tellement d'actualité, encore et toujours. Jusqu'au laxisme observé chez les officiels et régulateurs d'un sport en relation avec une certaine escalade de la violence, et pourtant il parle des années 1970 ! Encore d'actualité, définitivement.



J'admets avoir apprécié l'ajout en date de 2003 pour l'édition du vingtième anniversaire de parution où il traite d'événements précis et marquants tels la chute du rideau de fer et l'influence des Russes sur l'évolution du sport au lendemain de la menace Soviétique qui aurait dû provoquer davantage, sur les déboires de l'association des joueurs sous l'égide des Eagleson et des Goodenow, juste avant le fameux lock-out de 2004. Mais je suis un peu restée sur mon appétit: j'aurais tellement aimé connaître ses vues sur la suite des choses, sur les récentes sagas financières des concessions qui en arrachent, sur la réalité d'une ligue de sport professionnel qui semble s'enliser, sur toutes ces remises en question de ce qu'on fait ou on ne fait pas pour s'assurer d'une bonne relève…



Monsieur Dryden, considéreriez-vous quitter la politique et revenir dans le monde du hockey professionnel? Je pense qu'on a besoin de gens comme vous.



The Game par Ken Dryden, 1983, 2003



En version française: Le Match, 2008